JUSTICE : LA SUITE DU PROCÈS DIT DU JOURNALISTE PHOCAS NDAYIZERA, PROCÈS CONTRE LA JEUNESSE RWANDAISE

Par: RUBIBI Jean Luc

Ce mardi 9 juin se tenait l’audience du procès dit de Phocas Ndayizera et ses 12  co-accusés.  Ces jeunes arrêtés en 2018 sont accusés d’avoir «voulu comploter contre l’Etat rwandais et de terrorisme ». Les liens vers les articles sur le déroulement des précédentes audiences  sont à la fin de l’article.  Au cours de l’audience de ce mardi Byiringiro Garno,  a demandé au juge si la carte d’identité et le téléphone qu’il avait sur lui lorsqu’il a été arrêté sont des outils pouvant explosés ?

Dans le contexte du covid-19  l’audience était faite en ligne. Les juges se trouvaient dans le sud du Rwanda  dans la section spécialisée de lutte contre le terrorisme du tribunal de Nyanza, le procureur à Kigali et les accusés dans la prison de Mageragere. Depuis le début du procès sept personnes, dont Phocas Ndayizera, se sont défendues et ont toutes dit qu’elles sont innocentes. Elles ont dit toutes avoir été torturé lors de l’investigation et avoir été  forcées à avouer des crimes qu’elles n’avaient pas commis.

Byiringiro Garno, 22 ans, a été le premier à se défendre. Il a dit ne pas connaitre Cassien Ntamuhanga et n’avoir jamais discuté avec lui. Il a dit n’avoir jamais possédé les explosifs. Le procureur ayant dit qu’il a été arrêté avec sur lui sa carte d’identité et son téléphone, il a demandé au juge si ces deux éléments sont des explosifs ? Pris de court le juge lui a rappelé qu’il avait déjà avoués les charges qui pèsent contre lui, à cela  il a répondu qu’il a été forcé de le faire : « l’on m’avait dit que si je n’avouais pas, je serais dans des beaux draps ainsi j’ai avoué ».

Après Byiringiro, cela a été le tour de Bikorimana Bonehour, qui à son tour a plaidé non coupable de toutes les charges qui pesent contre lui. Il a dit que tout  a été fabriqué par l’accusation. Ce jeune de 25 ans seulement est né en 1995  a dit au juge qu’il ne peut pas conspirer contre le seul régime qu’il a connu ! Il est étonné de voir le gouvernement avoir peur d’un jeune comme lui, qui de plus est pauvre.

Il a été suivi par  Bizimana Terence, 23 ans seulement, qui a dit au tribunal être innocent et n’avoir pas les moyens financiers  de faire ce dont il est accusé. « Je n’ai pas les moyens de renverser le régime, je ne sais pas pourquoi le procureur a dit cela. Seul une personne avec les moyens peut renverser un pouvoir, c’est ce que nous enseigne l’Histoire, j’ai zéro moyen ! »

Ndayizera Phocas et ses 12 co-accusés.

Après des difficultés techniques dues à la coupure de l’électricité à Mageragere, le procès a repris. Munyansanga Martin, un autre accusé,  s’est défendu en niant avoir été impliqué dans tous les crimes dont il est accusé. Comme ses co-accusés il a dit n’avoir pas les moyens et n’avoir fait pas d’études pour pouvoir renverser le régime.  Le juge l’a interrompu et demandé si : « n’avoir pas les moyens ou n’avoir pas fait d’études  est votre formule pour dire que vous ne pouvez pas renverser le pouvoir ? », après cette interruption il a demandé à l’accusé s’il connaissait Cassien Ntamuhanga. L’accusé a dit le connaitre car ils sont nés au même endroit, cependant il l’a vu pour la dernière fois avent le génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda en 1994 car il a été emprisonné après le génocide, à sa sortie de prison Ntamuhanga était déjà journaliste  sur la Radio Ubuntu Butangaje « on ne sait plus jamais revus » a-t-il conclu. Lorsqu’il est revenu sur les accusations dont il fait l’objet  Munyansanga a dit : « mon dossier est composé des fabrications », « j’ai signé avec les yeux bandés, l’on m’avait mis un chapeau sur la tête et je voyais à peine » a-t-il ajouté pour répondre au juge qui lui rappelait qu’il avait déjà avoué avoir été impliqué dans les crimes dont il est accusé.

Le dernier accusé à prendre la parole a été Mushimiyimana Yves, 21ans seulement,  accusé de collaborer avec le RNC, [N.D.L.R parti d’opposition de kayumba Nyamwasa], et d’avoir voulu rejoindre l’armée de Cassien Ntamuhanga. Mushimiyimana a dit ne pas connaitre le RNC et qu’il ne pouvait pas rejoindre une armée qu’il ne connaissait pas.

Le point  commun pour ces jeunes est qu’ils font partie du RANP-ABARYANKUNA, la branche de la ville de Kigali. C’est le seul motif pour lequel ils ont été arrêtés et emprisonnés.  Ne  voulant pas s’avouer que la jeunesse rwandaise a formé un mouvement de résistance, craignant de le rendre populaire au Rwanda en en parlant ouvertement  les autorités rwandaises ne mentionnent jamais l’existence de ce mouvement. C’est pour cela que l’Etat rwandais a fabriqué les charges de terrorisme et de complot contre les autorités pour pouvoir poursuivre ces jeunes.  

Le procès reprendra le 09 juillet 2020.

RUBIBI Jean Luc

Kigali

Traduit en français par MUKUNDWA Anne Marie

Pour en savoir plus sur ce procès :

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