Écrit par Constance Mutimukeye
Dans la nuit du 07 au 08 mai 2020, l’armée rwandaise a abattu Ntagisanimana Moïse, 38 ans et Rehema Louise,une femme enceinte, les deux sont décédés sur le coup. Ils habitaient la province Ouest du Rwanda dans le district de Rubavu. La nouvelle a été publiée le 08 mai 2020 dans la matinée par le journal propagandiste du FPR igihe.com[1] et plus tard dans la soirée par l’antenne locale de la voix de l’Amérique (VOA)[2]. Dans cet article en plus de la nouvelle, nous ferons attention aux oublis que le journal Igihe.com a faits.
Selon la VOA, Ntagisanimana Moïse et Rehema Louise sont tombés sur la patrouille militaire des soldats du neuvième bataillon de l’armée de terre rwandaise, ils auraient essayé de faire entrer des sacs contenant 64kg de cannabis au Rwanda en provenance de la République Démocratique du Congo. Les soldats ont tiré sur eux lorsqu’ils étaient dans la vallée qui fait office de frontière entre les deux pays située dans la cité de Nyakabanda, la cellule de Rwangara, le secteur de Cyanze et le district de Rubavu.
Quant à Igihe.com, le journal s’était contenté de donner cette information : « Les forces de sécurité opérant dans le district de Rubavu ont abattu deux personnes, qui passaient par des voies illégales et transportaient du cannabis en provenance de la République Démocratique du Congo. L’incident a eu lieu au moment où la frontière rwandaise a été fermée pour empêcher la propagation de l’épidémie de coronavirus, seuls les Rwandais sont autorisés à retourner au Rwanda et sont immédiatement placés en quarantaine pendant 14 jours. Selon les nouvelles qu’Igihe a, ils ont été abattus vers minuit lorsqu’ils arrivaient dans la cité de Nyakabanda, la cellule de Rwangara, le secteur de Cyanze et le district de Rubavu , les victimes sont un homme et une femme âgés entre 30 et 38 ans, ils transportaient du cannabis entre 70 et 80 kg, dans 6 sacs ».
On peut se demander pourquoi Igihe.com n’a pas rendu public les noms des victimes, le fait que la femme était enceinte et le nom du bataillon qui les a abattus !
Selon la VOA, Ntagisanimana Moïse laisse derrière lui une femme et trois enfants. Il a été enterré dans la journée du 08 mai 2020 comme sa famille l’a dit : « Nous avons accepté de récupérer le corps et de l’enterrer correctement parce que c’était le nôtre. Le matin j’allais travailler, je suis maçon, une jeune fille, Nyirabayoboke, est venue nous annoncer que mon beau-frère avait été tué, nous avons cherché des jeunes pour aller voir, je n’avais pas la force de descendre dans la vallée, celui qui été abattu est notre oncle dans la grande famille, nous l’avons enseveli pas très loin ». Si l’on en croit Igihe.com «les corps des victimes ont été transportés à l’hôpital de Gisenyi ».
La femme enceinte Rehema Louise, laisse derrière elle un mari et un enfant. Il semblerait que faire entrer de la contrebande au Rwanda ait été son métier en collaboration avec sa famille. Ce qui n’est pas surprenant étant donné l’état d’extrême pauvreté dont souffre la grande majorité de la population rwandaise bien que la propagande du FPR fait croire aux étrangers que les Rwandais sont riches grâce à lui !
Pour Ntagisanimana Moïse, cela aurait été une récidive, en effet en 2016 il avait écopé d’une peine de prison de trois ans pour cambriolage avec utilisation d’une arme. Il faisait l’objet d’une libération conditionnelle depuis 2019. Mais sa famille a insisté sur le fait qu’elle n’était pas au courant du commerce du cannabis: « Ntagisanimana est sorti de la prison de Kiriba depuis plusieurs jours mais nous ne lui aurions pas soupçonné vendre du cannabis, même si la vie après la prison n’a pas été facile ».
Après cette exécution extrajudiciaire, les autorités rwandaises ont ténu une réunion d’information avec les habitants de cette localité. Igihe.com a reporté cette réunion comme suit : « le vendredi matin, l’administration du district, l’armée, le RIB et la police ont tenu une réunion avec les habitants de la vallée, les exhortant à ne pas continuer à se livrer à de tels actes d’insécurité ». L’information complète est reportée sur le micro de la VOA, sur lequel un habitant ayant assisté à la réunion s’est exprimé : « Le maire est immédiatement arrivé et a parlé aux gens, il leur a montré ce qui était arrivé, leur a dit de faire preuve de courage dans cet épreuve mais en soulignant également que c’est de leur faute, qu’ils nous sensibilisent mais que nous nous entêtons, que nous devrions pas beaucoup pleuré ceux qui ont été abattus dans la vallée, que c’est de leur faute».
Le porte-parole de l’armée rwandaise, le lieutenant-colonel Innocent Munyengango, a refusé de commenter, affirmant à la Voix de l’Amérique qu’il allait d’abord se renseigner et n’a plus répondu aux coups de fil ni aux SMS de la radio.
Ce n’est pas la première fois que la police rwandaise persécute une femme enceinte au point de la tuer. Le 27 mars 2019 l’armée/police rwandaise a poursuivi Elizabeth MUKARUGWIZA, qui avait 37 ans et était enceinte, elle s’est effondrée et est morte sur le coup. Elle traversait la frontière de Cyanika vers l’Ouganda, par les sentiers, pour acheter des denrées alimentaires et des médicaments.
Même si la peine de mort a été abolie au Rwanda, depuis le début de cette année de 2020, les forces de sécurité du FPR ont tué 17[3] (chiffre connu) personnes en utilisant la force (coups de feu, coups, …). En 2019 le nombre connu à ce jour des exécutions extrajudiciaires est de 50 personnes.
Constance Mutimukeye
[1] https://www.igihe.com/ubukungu/amabanki/article/abantu-babiri-barashwe-bavanye-urumogi-muri-congo-barapfa
[2] https://www.radiyoyacuvoa.com/a/5389568.html
[3] https://www.rwandanlivesmatter.site/#/numbers